Deuils politiques en France et en Espagne au XIXe siècle

Cette journée d’étude aura pour but d’aborder la question des sources et d’amorcer la réflexion sur les problématiques et les perspectives de recherches en Espagne à partir d’une comparaison avec le cas français.Née d’une épopée collective sanglante, l’Espagne issue de la Guerre d’Indépendance échoue paradoxalement à forger son identité autour du souvenir de cet héroïsme fondateur et dans l’hommage à ses morts pour la patrie. Lorsque la monarchie constitutionnelle est enfin solidement installée, à partir des années 1830, ce mythe ne peut être que difficilement exploité, tant sont grandes les divergences entre les héritiers des premiers libéraux. Le caractère éphémère du panthéon national (1869-1875) traduit cette incapacité à forger, bien au-delà de la Guerre d’Indépendance, une mémoire civique unitaire.A l’opposé de ce constat d’échec, les deuils politiques semblent sollicités avec davantage de succès par des constructions mémorielles partisanes, qu’elles s’inscrivent dans le cadre du nouveau régime ou en dehors de lui (absolutisme et carlisme). Funérailles et monuments cristallisent ainsi souvent des mémoires concurrentes. En outre, dans un contexte où le suffrage, la liberté d’expression et la liberté de réunion sont restreints, l’apprentissage de la modernité politique passe par des pratiques politiques informelles qui permettent d’échapper partiellement à ces contraintes et de s’abriter derrière le masque de pratiques sociales traditionnelles. Le deuil protestataire constitue ainsi un terrain idéal pour étudier des phénomènes de politisation sur lesquels nous sommes aujourd’hui mal renseignés.